CLÉMENT-THOMAS (Jacques Léonard Clément, dit le général).
VIOLENTE DIATRIBE CONTRE LE REGIME FINISSANT DE NAPOLEON III.Clément Thomas le complimente pour son ouvrage : .c'est par des uvres de ce genre qu'on démolira 1'infâme. Il s'inquiète de .l'effroyable gâchis qui règne à Paris ( ). D'où partent donc ces ineptes et grossières injures qu'on jette publiquement à la face d'hommes qui peuvent errer quelques fois, mais que la démocratie a reconnus et choisis comme ses représentans (sic) et ses chefs ? Qui a donc pu compromettre L.R. [Ledru-Rollin] comme on l'a fait, et amoindrir une figure qui avait une si grande valeur ? Qui a fait naître, qui entretient, qui surexcite ces divisions funestes, maladie endémique du parti, et qui semble toujours redoubler dintensité au moment ou lunion serait le plus nécessaire ? Je ny comprends rien, je lavoue, et jen suis à me demander si le despotisme dégradant qui pèse depuis vingt ans sur la génération qui nous suit, a tellement énervé les âmes, quil ne leur reste plus le ressort nécessaire pour reconquérir leur liberté Clément Thomas se sent d'autant plus irréconciliable que ce qui le sépare de .ces misérables., c'est .la conscience de la France avilie, cest lhonneur (.). Cela vous fera comprendre avec quelle douleur je vois des scissions déplorables venir ajourner, au moment de latteindre, le châtiment mérité
GOUNOD (Charles).
Contrariétés au sujet des répétitions d'un concert d'un ouvrage du compositeur Félicien David .On vient à linstant mannoncer que Félicien David ne se mêlant de rien dans le concert de demain par suite des débats avec le directeur, et ayant déclaré dans les journaux mêmes que rien de ce qui à lavenir se ferait aux Italiens au sujet de sa musique nétait organisé par lui, on vient, dis-je, mannoncer quen vertu de cette brouille il est impossible que celui de ses amis qui devait par lui nous faire entrer aujourdhui à la répétition comme la dernière fois sen charge avec espérance de succès.Vatel seul est à la tête de la chose : dune part je ne le connais pas, et de lautre tu supposes de suite que si je me présentais avec toi à la porte du théâtre comme ami de David je trouverais dans le concierge (dont jai une fois déjà éprouvé lamabilité) une tête de Rois qui me dirait de par le directeur : je ne connais pas Mr Félicien David.Je suis vraiment très chagriné, mon bon Jules, de tavoir fait perdre encore cette matinée. Si javais su plutôt cette affaire je te laurais apprise de suite : mais ce nest quà la minute que jen suis informé.Jules Richomme, fils du graveur Théodore Richomme, est né et mort à Paris (1818-1903). Peintre, dessinateur et graveur, il peignit essentiellement des scènes de genre, des tableaux historiques ou religieux. Il partagea avec Camille Corot la décoration des chapelles de la Vierge et de Saint-Nicolas pour léglise de Ville dAvray. Il signe également plusieurs décorations déglises dont celle de Saint-Séverin à Paris. Il fit des décorations pour la Ville de Cherbourg. Son atelier se trouvait Cité Pigalle à Paris. Jules Richomme entretient une correspondance remarquable pendant toute sa vie avec son ami le musicien Charles Gounod dont des éléments furent publiés par son gendre André Beaunier.Félicien David est un compositeur dinspiration romantique, 1810-1879.
MARMONT (Auguste Frédéric Viesse de, duc de Raguse).
Brouillon de lettre du maréchal Marmont dans laquelle il avise dune stratégie militaire à tenir.Jai reçu les lettres que vous mavez fait lhonneur de mécrire en date des 12 et 13 et je mempresse dy repondre. Conformement à vos ordres, je le ferai en toute liberté. Jetablis en principe (.) quune franche bataille est indispensable au debut de la Campagne. Sans une part de succès qui vous donnera de lascendant sur lennemi, nous naurons quune marche incertaine. Or elle doit etre livrée sous vos auspices, sous Votre commandement immediat, quelque soit le coté par lequel se présente lennemi, et pour quil en soit ainsi, larmée quoique tres nombreuse, doit etre réunie le plus possible.Vos reflexions sur les inconvénients dune position où lon pèteroit (?) le flanc de lennemi et déffiloit continuellement près de la frontière de Boheme pendant huit marches, sont trop fondées pour quil puisse jamais etre question de séloigner ainsi de lElbe (.). Je voudrois que toute larmée fut établie sur la Sprée et sur lElbe, en attendant que lennemi sapprocha assez pour quelle put lavaler, et cette franche poursuite et trappes entre elles, vous donneroit le moyen detre présent partout à la fois dans les moments du parcours (?), chose que je veux regarder comme la garantie de vos succès.Je comprends votre impatience à vous emparer de Berlin, et je la partage. Cependant le moyen dy arriver surement nest pas possible de Schater et se mettre en marche dans cette direction. Le but de la campagne nest pas de ce côté et le destin de Berlin doit être la consequence de ce qui se passera ailleurs. Si vous persistez à prendre cette offensive tout dabord vous vous privez dune partie de vos forces, tandis que la partie darmée en avant (.) a quelque mouvement de Magdebourg et de Hambourg suffise pour neutraliser larmée prussienne qui couvre Berlin. Après une franche bataille gagnée sur lElbe et sur la Sprée, vous pouvez sans danger former tels mouvements excentriques que vous voudrez, et le succès de la marche sur Berlin sera incontestable.Mais si le temps dattente auquel je vous propose de vous soumettre vous parait trop pénible, alors jaimerois mieux une offensive directe sur toute la Bohême. Les troupes qui sont en Bohême se reuniraient sur la Neisse, pour couvrir le mouvement qui se feroit sur Peterwald se rapprocheroient de lElbe si (nom propre) marchoit à elles pour les combattre, et finiroit par suivre le mouvement général ou bien intervient directement en Bohême par le débouché de Zottan. Une bataille gagnée en Bohême auroit dimmenses conséquences, vous donneroit de grands résultats, et la possession dun pays qui vous assureroit de hautes ressources, et peut etre ameneroit la separation de lAutriche. Alors la Prusse seroit a votre merci.Pendant le Consulat Marmont combat en Italie, en Égypte, en Prusse, en Autriche, au Portugal, en Espagne et en France. Général de Division à l'âge de 26 ans. Il est l'un des quelques élus qui accompagnent Bonaparte dans son voyage à travers la Méditerranée, et joue un rôle important dans le coup d'État de Brumaire. À sa grande déception, il ne fait pas partie de la première vague de maréchaux. Après avoir fait ses preuves en tant qu'administrateur des provinces Illyriennes, il retourne au combat en Espagne et en France avec un succès mitigé. En 1814, son changement radical de position lui vaut d'être particulièrement bien accueilli par Louis XVIII. Il finit son existence à Venise où, en plus de sa réputation de gastronome et de sa fréquentation des salons il devient une cause célèbre non seulement parce qu'il vit ouvertement avec deux femmes mais aussi en raison des Mémoires vengeresses qu'il rédige, et dont les neuf volumes seront publiés à titre posthume à Paris, à partir de 1856.
CADOUDAL (Georges)
La 3ème chouannerie, qui débute en octobre 1799, remporte dabord de grands succès, avant de se trouver confrontée à des difficultés dues en partie au renfort des troupes républicaines redéployées dans lOuest par Bonaparte.Le coup dÉtat du 18 brumaire (9 novembre 1799) amène au pouvoir Napoléon Bonaparte. Il nomme Gabriel dHédouville à la tête de lArmée de lOuest et entame des négociations avec les Royalistes. Mais bien quHédouville ait obtenu la suspension des armes de la part de nombreux chefs chouans et vendéens, Bonaparte décide dintensifier la pression militaire par lenvoi de nouvelles troupes. Cadoudal, qui souhaite continuer le combat, perd une dernière bataille au Pont du Loch et doit se résoudre à capituler, le 10 février 1800.Le 25 février, deux jours après cette lettre, Cadoudal se met en route pour Paris dans lespoir de rencontrer le Premier Consul. Il le voit deux fois, le 4 et le 6 mars, mais cette dernière entrevue se passe mal. Le 9 avril, il quittait Paris pour Londres.TRÈS BELLE LETTRE RELATIVE À LA PACIFICATION (CADOUDAL DEMANDA LA PAIX LE 1ER FÉVRIER 1800) La lettre que vous trouverez ci-incluse vous prouvera que vos troupes se portent encore à de grands excès. Au Nom de dieu donnez des ordres positifs et sévissez contre ceux qui oseraient les enfreindre. Le Morbihan est en pleine paix il serait tems de le déclarer à son de trompe, ce seroit je crois un moyen dempêcher la troupe den vexer les habitants Cadoudal redoute que le remplaçant du général Brune (qui quitte le commandement de lArmée de lOuest le 26 avril 1800) ne soit pas dans les mêmes dispositions : Jai tant de peur de voir une mauvaise tête nous commander après votre départ quà chaque lettre je ne cesserai de vous répéter de faire choix dun homme sage et sensé que vous chargerez de consommer dans ce pays luvre de la paix si heureusement commencé par vous alors il vous aura la double obligation de lavoir préservé dune dévastation et à votre départ de lavoir mis entre les mains dun homme propre à cicatriser et non à renouveller ses plaÿes. Joubliois de vous annoncer encore un autre assassinat commis sur un nommé Davalo dans la paroisse de Tréal proche Ploërmel. Au nom de lhumanité mettez fin à ces malheurs
PROUST (Marcel).
` ^TRE?S BELLE ET INTE?RESSANTE LETTRE DANS LAQUELLE MARCEL PROUST E?VOQUE LE PEINTRE VE?NITIEN VITTORE CARPACCIO [pour Proust, le symbole me?me de Venise, dont il se servira dans Albertine disparue] ET LES « MORNINGS IN FLORENCE » DE RUSKIN, publie?s par Laurens (en 1908) : .Si plus tard votre collaborateur vous rend le Carpaccio italien (que je ne connais pas) je serai tre?s heureux de le lire, si vous pouvez me le pre?ter. Quant au franc?ais je vais e?crire a? Venise ou? on me dit quil a e?te? e?dite? Carpaccio est un artiste si charmant quon voudrait pouvoir e?tre toujours plus renseigne? sur son uvre et sur sa vie. Si vous naviez de?ja? dispose? du cpte rendu, je me serais mis a? votre disposition pour le faire. Si M. Laurens publie les Mornings in Florence vous devriez lui conseiller ceci. La magnifique e?dition de Ruskin (Library Edition) qui parai?t chez Alen. Proust pre?cise que les Mornings contiennent un .ine?dit « The visible church », tre?s inte?ressant. M. Laurens naurait pas le droit de le publier, car il ny a pas assez de temps quil a paru. Mais par voie dappendice ou de note en disant franchement ou? il le prend, il pourrait en donner de longs extraits. Du reste les Mornings in Florence sont bien courts pour constituer un volume, il devrait y ajouter Val dArno qui est dailleurs infiniment supe?rieur aux Mornings in Florence lesquels sont le plus mauvais ouvrage de Ruskin, franchement me?diocre. En grand admirateur du critique dart anglais John Ruskin, et, à la suite de la traduction quil fit (avec laide de sa mère Jeanne Proust) de La Bible dAmiens du critique anglais (parue au Mercure de France, en 1904), Marcel Proust avait été promu « expert en études ruskiniennes ».En novembre 1905, Proust fut donc approché par Auguste Marguillier, un ancien collaborateur de Charles Ephrussi (un ami de Proust), devenu directeur de La Chronique des arts, pour un compte-rendu de Pierres de Venise de Ruskin, que Mathilde Crémieux, une cousine de Proust, venait de traduire et qui allait paraître chez Henri Laurens, le futur éditeur des Matins de Florence de Ruskin. En janvier 1906, Proust adressait à Marguillier une notice au sujet du Gainsborough de Gabrielo Mourey paru dans La Chronique des Arts, puis dans les « Villes dart », une collection (éditée par H. Laurens) très appréciée par lauteur de La Recherche ; toujours dans la même collection, Proust découvrit avec plaisir le Carpaccio de G. et L. Rosenthal (paru en 1906), auquel il fait allusion dans cette lettre.Introduit dans La Recherche, au travers des chatoyantes robes du couturier Fortuny offertes à Albertine par le Narrateur, le peintre vénitien Vittore Carpaccio (1460-1526) fut longuement étudié par Proust lors de ses séjours à Venise grâce aux ouvrages de Ruskin.
MARIE LOUISE DE HABSBOURG LORRAINE.
BELLE ET LONGUE LETTRE SUR SON VOYAGE DE RETOUR, APRÈS UN SÉJOUR À VIENNE :.Nous voilà arrivé heureusement ici depuis hier soir à 8 1/2 et mon premier soin ce matin en méveillant est de vous écrire mon bon ami (.). Jespère quici vous me trouverez une correspondante plus exacte car jaurai moins de visites de ma famille et de mes amis dont jai laissé la plus grande partie à Vienne. Jaurois bien voulu voir le beau feu dartifice que vous avez fait en mon honneur le jour de ma fête, peut-être que nous pourrons le répéter un autre jour cet hyver (.). Je me figure que vous serez maintenant déjà à Gênes, et je me réjouis de lire ce que vous mécrirez sur limpression que vous a fait cette belle et grande ville. Pourvu que vous ayez meilleur tems que nous, il pleut averse et jai bien peur que lentrée solennelle naura pas lieu, ce dont je serai faché puisque ce seroit au moins un petit moyen pour couper lennui de ce séjour. Jai encore diné hier à Schonbrunn mais chez moi pour faire plus vite, et suis partie à 3 heures avec un tems épouvantable. Après avoir dépassé Schwechat près de Vienne, elle a pu admirer le .Neugebaüde ancien vieux château fort où sont à présent les poudrières et qui est fameux dans lhistoire pour lentrevue qui y eurent Jean Sobieski et lEmpereur Leopold après le siège de Vienne. Plus loin il y a le gros village de Kaiser Ebersdorf où se trouve la grande caserne de lartillerie. Le pays pendant les trois premières postes (.) est dune horrible monotonie. (.). Après Riegelsbrunn on découvre derrière des bois les tours du château dOrst grande possession patrimoniale de la Couronne, qui appartient à mon Père et à tous mes Oncles. A une demie heure de là on voit a droite une antiquité romaine qui ressemble à une potence, et a gauche limmense parc de Petronell appartenant a la comtesse Trann on dit que son château a 305 fenêtres, nous vimes ici quatre rayons darc en ciel a la fois. Arrivée à Presbourg la nuit tombée, elle ne put voir .quun pont de bateau. sur le Danube, .dans peu de jours je vous ferai la description de mon nouveau séjour. Jhabite dans la maison de la vieille comtesse Charles Esterhazy et suis assez mal logée car jai entre ma chambre à coucher et mon salon une espèce de grande antichambre où jai mon clavecin et où tout le monde peut entrer chez moi du corridor. Mlle Bianchi est dans une autre maison à une lieue de moi et avec cette boue hongroise ce nest pas une bagatelle (.). Si ce nétoit que pour un ou deux jours on en riroit mais pour un séjour de plus de trois semaines cest par trop fort (.). Je finis car il fait si obscur que je ny vois rien dans cette rue si laide et sale. Après la fin de lEmpire et labdication de Napoléon, Marie-Louise revient à Vienne, où elle sinstalle à Schönbrunn avec quelques rescapés de la cour des Tuileries.Devenue duchesse de Parme en 1816, lex-impératrice sinstalle en Italie, laissant son fils le roi de Rome à Vienne. Elle épouse à Parme le comte Niepperg après la mort de Napoléon.
COCTEAU (Jean)
Au commencement de la Grande guerre, Cocteau est assigné au service des ambulanciers auprès dune unité de fusiliers marins sur le front de Nieuport en Belgique. Il passe tout lhiver 1915 et le début de lannée 1916 dans la région de lYser où il vivra une expérience traumatisante qui conditionnera sa vie future. CE PRÉCIEUX MANUSCRIT DE POÈMES CHARGÉ DÉMOTION CONSTITUE LA RELATION DE CETTE TERRIFIANTE EXPÉRIENCE.Ma mère cétait bien elle assez bien elle / avec un tablier gorge de pigeon bordée (sic) de velours noir / et un petit lézard de diamant à son corsage / Elle me dit : je viens par le tunnel du rêve / Jai voulu écouter le canon avec toi / Car cette nuit il y aura une attaque / et moi je disais mais non, mais non / alors elle sassit près de moi / elle posa ses mains sur moi / et elle était dune tristesse immense / Elle me dit : Tu sais ton frère a son brevet de pilote / aussitôt / Et javais douze ans à la campagne / le soir, dehors, après dîner / mon camarade Charles dit : "il paraît / que les frères Whrit volent" / Maman sourit en cousant / Mon frère Paul toujours incrédule / Et Charles dit : Je serai mort / il y aura une grande guerre / et Paul qui fume la sous ce chêne / Volera et jettera / des bombes la nuit sur des villes [alors jétais avec mon frère en aéroplane / nous volions dans un appareil Nieuport sans moteur / Nous volions a une grande hauteur / au dessus dun port ou entraient et sortaient les navires.].[Juste au dessous de nous / il y a maman / elle nous cherche / elle nous cherche sur toute la terre probablement / alors je le suppliai de descendre / mais il disait : nous ne pouvons plus redescendre]Je me réveille mon bras / tué semplit deau de Seltz et le songe / Quelle heure est il a-t-on dîné / Le lieutenant me jette un coussin à la tête / mais couche toi donc tu dors debout / Je ne dors pas / Une lame de fond me roule / dans ce faux sommeil / Et je maccroche / à la barque jentends des rires / mais une lame de fond / memporte / profondément / dans les mers mortes / Alors jétais avec mon frère en aéroplane ( ) Nous volions a une grande, grande hauteur / au dessus dun port ou entraient et sortaient les navires / Il me dit / Tu vois sur ce bateau / Juste au dessous de nous / il y a maman elle nous cherche / Elle nous cherchera probablement sur toute la terre / Et je le suppliais de descendre / mais il disait : non nous ne pouvons plus redescendre .Ils dorment tous ( ) / Ils se sont tous remplis comme un bateau fait eau / et soudain flotte à la dérive / Cette épave de couvertures / de genoux de coudes / ( ) / les obus tombent / sur lhôtel de ville quil fait bon / sous leur bocage / nuit détoiles / La fusillade tape / de coups de trique secs sur / des planches tout lhorizon / sécroule.Cette nuit dans les mines / Une nuit à Nieuport Jai surpris entendu / le travail du rossignol au clair de lune / Qui donc brait / tousse glousse grogne et coasse / dans larbre endormi debout au cloroforme / ( ) Cest le rossignol il prépare / son chant damour à la rose / a la rose en avril / et je sens ici là non là / cette odeur / mais cest elle ! Cest la rose ! / Voilà deux ans que je nai pas senti de rose / Le rosier viril en boutons / et bientot féminin / concentre / un explosif dodeur / qui tue les papillons crédules / Prépuces frisés de la rose / indécente / de la chaleur jadis ici / je vois une rose rouge .Entre les deux poussent / La brousaille de fil de fer où se cabrent ( ) / les chevaux de frise. Là / là cest le boulevard où on meurt / Le sol qui tue / Si on y marche / Comme sur le rail rouge du métropolitain ( ) / La bande mixte / plus vide que sil y a la peste / La nuit on y fait des patrouilles / mais pas / La bande mixte / La zone qui foudroie / car en haut de petits trous / du périscope / loeil surveille et se perche ( ) seul sur les sacs .Mais ici la vie est interrompue / Car cette ville calme, cet égoût / étoilé sont moins sûrs / que Véra Cruz pendant la peste / Même / il arrive même quun promeneur / nentende pas gémir loiseau / des balles mortes / Et sans rien comprendre il sent sa figure vaporisée avec du chlorure de méthyle / [Et de nouveau la mer / Se posait de tous les côtés / comme une partie déchecs / autour de notre marche des mille murs du labyrinthe] ( ) / [Et de nouveau la nuit / Déplaçait le bruit de la mer / comme un jeu déchecs / De tous côtés autour de nous / autour des mille / a droite à gauche de mille murs du labyrinthe].Capitaine ! - Mon Capitaine ! / Nous allons arriver. Quelle route ! / les Ces trous dobus ! Le brancard / le brancard défonce la paroi en mesure, impossible / impossible de lattacher. Mon Capitaine ! / Mon Capitaine ! / Jai sa main qui sue, ses poils, son bracelet montre / Pitié ! Achevez moi ! Prenez mon révolver ! / Soyez charitable ! On arrive / On arrive / Mon Capitaine, on approche / on ne voit rien dehors. Sa balle Sa balle est dans le ventre. ma femme / ma femme , il faut / Taisez vous, ne me parlez pas / vous parlerez à lambulance / Sortons dabord de ce chemin / ou les marmites / Pouf ! Quatre Sa pâleur / éclaire, on voit ses mains sa moustache qui tremble / Calmez vous mon Capitaine / on approche / où sommes nous ? / À Gronendick. Encore ! / Je ne pourrai jamais / il vaut mieux machever / Calmez vous mon Capitaine / a boire ! Il ne faut pas / il ne faut pas boire. Il saute ! Ha je me couche.Le Discours du grand sommeil avait été dédié au jeune poète Jean Le Roy, mort au combat. Lépigraphe indique que ce long poème est "traduit ( ) de cette langue morte, de ce pays mort où mes amis sont morts". Dès lors, la poésie devient une confrontation avec la mort, les pirouettes verbales si singulières de lécriture de Cocteau napparaissent que comme des exercices de funambulisme pour masquer le danger permanent de la mort. Le Discours ne parut pas en volume ; il fut recueilli dans Poésie : 1916-1923 (Gallimard, 1925).
COCTEAU (Jean).
Belle et émouvante lettre de Jean Cocteau à lépouse du peintre Jean-Paul Brusset, qui fait suite au différend qui opposa les deux peintres lors de la réalisation des fresques à la chapelle Saint-Pierre de Villefranche-sur-Mer : Pour une ligne sans importance dans un canard ( ) votre mari a oublié que je disais à chaque personne ma gratitude pour sa gentillesse et son courage, que sans lui je ne pouvais rien. Il a oublié ma préface, plus importante, je le crois, quun article. Le pauvre Brusset ne pense pas que si jai cité Triquenot cest uniquement parce quil me la présenté, et que Triquenot ma bien signifié quil était peintre et quil ne travaillait avec moi que par exception. En ce qui concerne lodieuse phrase sur « la chapelle qui se fait toute seule », elle prouve, hélas, que Brusset na rien compris (et ne comprend rien à une phrase très belle et très émouvante), jai dit que son aide et le céramiste quil découvrait être étaient autant de miracles dictés par la chapelle qui nous donne ses ordres. Sil voit tout par le petit bout de la lorgnette, mieux vaut quil parte et quil me laisse tomber. Ce ne sera pas ma première déception du cur (hélas).Il ajoute un long post-scriptum, véritable cri du cur : Il faut que je vous dise la vérité que personne au monde ne peut croire. Je suis un pauvre. On ma toujours volé, au cinéma surtout. Sans Francine [son amie et mécène Francine Weisweiller] je ne pourrais pas vivre sur la côte 15 jours. Je nai pu payer votre séjour que par sa bonté. Si jétais riche vous pensez bien que je vous couvrirais tous dor et que je nirais pas pleurer misère à la mairie En 1955 le peintre Jean-Paul Brusset (1909-1985) sinstalle sur la côte dAzur avec sa seconde épouse, laméricaine Margaret Tatum. Quelque temps auparavant, il avait inauguré avec Aimé Maeght la fondation Maeght à Saint-Paul de Vence. Brusset travaille la céramique à Vallauris. En 1956, il retrouve Jean Cocteau sur la Côte, qui lui demande sa collaboration pour l'exécution du travail graphique des fresques de la chapelle Saint-Pierre de Villefranche-sur-Mer et de la salle des Mariages à la Mairie de Menton. Seul le travail de la chapelle sera exécuté car un différend va opposer Jean Cocteau à lépouse du peintre, Margaret Tatum Brusset, la destinataire de cette lettre.Jean Triquenot supervisa le travail des fresques à la chapelle, en labsence de Cocteau.
SARTRE (Jean-Paul).
Fragments de brouillons autographes dans lesquels Sartre consigne quelques réflexions :.Mais cette nouvelle structure conduit à des contradictions nouvelles. En premier lieu, dans la mesure même où le chef transcende la pluralité vers lunité, il introduit le transcendant dans limmanence, cest-à-dire lextériorité dans lintériorité.Que ces totalités, définies de lextérieur par leur fonction sociale, se produisent en même temps de lintérieur par et pour leur praxis sur le monde par un processus toujours plus poussé dintégration et, simultanément.Cest ce que nous appelons lexpérience de la nécessité. Ce nest pas une contrainte puisquelle se réduit à une absence et pourtant nous ne pouvons pas y échapper : si lon devait léprouver comme présence concrète, nous la sentirions comme force ennemie ; ce nest pas un impératif puisquelle sétablit comme vérité sans réclamer notre concours.chaque niveau tout est donné, homme et matière, praxis et matérialité. Il faut seulement se garder de sarrêter sur le chemin de lanalyse régressive car nous tomberions à linstant dans lidéalisme, tout comme il nous faudra mener la progression synthétique jusquau bout sous peine de substituer à la dialectique un mécanisme affolé.